Les relations mère-fille sont très délicates, si bien que l’on finit par ne plus se faire comprendre, ni se faire entendre. Si les mamans en souffrent, bien souvent elles extériorisent leurs sentiments, quand certaines ados finissent par se replier sur elles-mêmes voire par refouler leurs ressentis. Lettre d’une mère à sa fille se veut être un message empreint de douceur aussi bien pour les grandes que pour les petites sœurs.

Ma fille,

Je t’aime d’un amour limpide même si nos relations sont troubles. Il ne se passe aucun jour sans que ce silence me ronge. Pardonne-moi ma maladresse et la rudesse de mes mots, il arrive que ma douleur dépasse l’entendement, passe sur tes maux.

Oummi,

Comment te dire tout haut ce qui consume mon cœur et le déchire. Ton regard et tes jugements ont souvent raison de mon silence. Bien plus fragile et plus faible que toi, j’attends de toi un refuge, un asile, et non un tribunal à chaque fois, que le dialogue entre toi et moi s’asphyxie. J’ai besoin d’une oreille attentive, de douceur et de « je t’aime toi ».

Ma fille,

J’ai beau me dire que je suis passée par là, que ces relations tendues mère-fille que j’ai connues autrefois, apaisées elles seront avec toi… J’ai beau me dire que je ne reproduirai pas le même schéma, qu’une complicité indéfectible je veux construire avec toi… Je n’y arrive pas.  Dépassée très vite je suis et les cris prennent le dessus sur moi… Sans doute qu’inconsciemment j’imagine que marquer mon autorité sur toi c’est éteindre ta douleur à coups de cris et de « tais-toi ».

Oummi,

Si tu savais combien je souffre et combien j’ai besoin de câlins, les soirs dans mon lit de soufre, la douleur s’invite jusqu’au petit matin. Je rêve de complicité, de rires, d’échanges apaisés, mais ça ne dure qu’un temps… Les cauchemars survivent à l’aurore et à sa clarté … Si tu savais combien je brûle de ne pas pouvoir te parler sans tabou, sans gêne, tout en humilité.

Ma fille,

Ce que l’on ne possède ne peut être donné, j’ai manqué de temps de choses que je pensais pouvoir te donner. J’en avais la certitude et pourtant j’ai échoué. Si seulement je savais te parler sans hurler, te conseiller sans juger, t’épauler sans souligner tes maladresses, t’aimer sans t’égratigner…

Oummi,

Personne n’est parfait et je ne recherche de perfection chez toi, juste de la bienveillance, une épaule solide et des encouragements. On ne peut rattacher sans cesse au passé nos faux pas présents. Tout le monde peut changer, pourvu qu’on le veuille foncièrement. Je ne te demande pas d’être l’amie idéale, juste d’être là pour moi lorsque je vais mal ou pas. Etre là tout simplement.

Ma fille,

Je n’ai jamais autant mesuré la chance  d’être maman que depuis le jour où j’ai croisé ton regard pour la première fois. Cette sensation forte, cet amour latent, tout ce que j’ai contenu durant 9 mois, s’est manifesté brusquement. Je ne sais pas ce qui est le plus déroutant ; cet amour inconditionnel que je te porte, ou la frustration de ne pas répondre à tes attentes. Tu es bien plus que mon enfant, un don du Généreux, une amana sans prix.  Si tu savais combien il est difficile de dompter ses émotions, de te voir grandir et sentir que tu t’évades, que je ne suis pas maîtresse de tout, que le temps qui file nous happe. J’ai tellement peur de ne pas être à la hauteur que le contrôle m’échappe.

 

Oummi,

Nous ne sommes pas amies et je le concède. J’aimerais juste que tu te fasses à l’idée que je suis une personne à part entière, avec des sentiments, des avis, des idées. Si seulement tu prenais la peine d’écouter tout ce qui est en moi enfoui. J’ai la tête pleine de rêves et de doute aussi. J’aimerais que l’on chemine ensemble dans cette longue venelle qu’est la vie. Aussi étroite soit-elle je veux pouvoir me lover contre toi ,  sentir que peu importe les choix que je ferai, ton regard empreint d’amour pour moi, jamais ne se fera gris.

Ma fille,

Je te demande pardon pour ces pots cassés, ces marques d’amour absentes, ces tentatives de tendresse avortées. Pardon pour ma maladresse et mes actes manqués, pour toutes ces fois où j’ai pris tes cris de détresse pour des caprices d’enfant gâtée. Je te promets d’être là à chaque instant de ta vie, d’être cette épaule, cette main qui épongera tes soucis. Pourvu que l’on se fasse mutuellement confiance, pas de vice ni te traîtrise, de la transparence et de l’authenticité en toutes situations.  Enterrons la hache de guerre, faisons table rase du passé. Je me languis de te redécouvrir et de créer des moments de complicité. Je t’aime éperdument, ma fille, ma bien-aimée.

Oummi,

Je ne te promets pas d’être l’enfant parfaite, seulement d’être ce que je suis. Avec mes qualités, mes défauts, à tes côtés je rêve de mûrir. Et  si je me trompe ou trébuche, prends-moi la main et relève-moi, j’ai besoin d’un pilier, d’un roc, non d’une flèche en permanence rivée vers moi.  Partante je suis pour un nouveau départ, un nouveau défi teinté d’amour et d’espoir.

Les responsabilités qui pèsent sur nos épaules font, qu’inconsciemment ou non, nous outrepassons nos rôles. Il n’est pas de parent parfait tout comme il n’existe pas d’enfant qui le soit. Puisse Allah déverser Sa Rahma dans nos foyers et préserver nos amanas. Ces enfants, ces joyaux que l’on a portés et que l’on élève, sont à l’image de ce que nous sommes. Que celui qui espère le respect et l’amour en retour, les sème depuis qu’ils sont petits. Tout don finit par nous revenir un jour ….