As salamou alaykoum wa rahmatoullah, aujourd’hui nous partageons avec vous cette magnifique lettre qu’une sœur convertie nous a fait parvenir. Une lettre pleine d’émotions et de justesse qui s’adresse à un parent non-musulman et qui inspirera plus d’une personne, c’est certain…

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Au nom de Dieu Le Clément, Le Miséricordieux,

Je t’écris cette lettre, toi qui m’as vue grandir, pour te dire tout ce qu’il m’est difficile d’exprimer autrement à propos  de la femme que je suis devenue.

Je suis aujourd’hui mère à mon tour, et celle que je suis n’est que la somme de mes multiples identités : mère, femme, musulmane, citoyenne, fille, sœur… et de tout ce qui m’a faite et fortifiée : ton éducation, mes fréquentations, mes épreuves, mes expériences, ma religion…

Tu me vois différente de celle que tu aurais voulu que je sois ; tu me connais avec tous mes travers, mes défauts et mes faiblesses. Devenue femme, épouse puis maman, je reste ton enfant et tu voudrais à la fois me protéger et à la fois me faire la leçon comme tu as su le faire toutes ces années. Tout ceci je le sais, je le devine et  je le comprends. Elever un enfant, à fortiori dans les conditions que nous avons connues, c’est donner ce que l’on peut, le mieux que l’on peut, pour qu’il soit capable un jour de nous quitter sûr de lui et équilibré. Ce n’est certes pas ce qui s’est passé mais personne n’est à blâmer. Je sais aujourd’hui qu’on est parfois amené à prendre des décisions qu’on aurait souhaité ne jamais avoir à prendre, que souvent on est contraint d’opter pour le moins pire et que toujours, on se retrouve à se demander ce qu’on aurait pu faire différemment. Quelles que soient les valeurs qui sont les nôtres, on espère tous s’épanouir et voir s’épanouir ceux qui nous sont chers sans que personne ne soit blessé par les conséquences de nos actes. Et en ce qui concerne nos enfants, on leur transmet ces valeurs, en espérant qu’ils les fassent leurs et s’en servent mieux que nous pour avancer sans tomber dans les pièges qui nous ont été tendus avant eux. Et je sais, j’imagine, comme il peut être difficile de voir son enfant opter pour une vie qui nous est étrangère, pour des valeurs qui semblent si différentes, si éloignées des nôtres. Cet enfant c’est moi, et cette vie, ces valeurs, l’islam. Or je sais ce que tu en penses. Mais je sais aussi que tu as tort. C’est difficile pour moi, sans doute pour toi, car habituellement c’est au parent de corriger son enfant. Tu as l’expérience et la sagesse que je n’ai pas. Mais j’ai dans mon cœur un trésor que tu ne possèdes pas. Ou, comme je l’espère du plus profond de mon être, pas encore.

Laisse moi je te prie, te décrire cette richesse et ces valeurs que j’ai faites miennes.

« L’Islam est apparu étranger et redeviendra étranger comme il a commencé, alors bonne nouvelle aux étrangers. » Cette parole de notre prophète, que la paix et le salut soient sur lui, nous informe que l’islam est apparu comme une religion totalement étrangère aux mœurs alors en vigueur en Arabie, où elle est née. Et c’est le cas à nouveau aujourd’hui ; lorsque la société invite à la débauche, à la liberté sans limites aucunes, l’islam nous impose un cadre et une retenue face à certains désirs que l’homme peut être amené à ressentir. Ce que vous êtes nombreux à voir comme une série de contraintes, nous sommes au contraire tout aussi nombreux à le ressentir comme une liberté : nous ne sommes libres que lorsque nous choisissons nos limites. Et les limites qui nous sont imposées par notre religion font sens à nos yeux. En me voilant, je me libère des diktats sociaux imposés aux femmes, je choisis ce que je veux montrer de moi, de mon corps. Je mets des limites claires à ce que j’estime être mon intégrité physique et je ne me sens plus considérée comme un être fait de chair uniquement. En ne consommant plus d’alcool ou certains types d’aliments, je m’impose une alimentation saine, je reste maître de mes pensées et de mes actes à chaque instant. Mais l’islam, souvent résumé au foulard ou à ces quelques « interdits » est tellement plus que ça. Déjà, il y a une règle de base qu’il te faudrait connaître : en islam, si ça n’est pas interdit c’est autorisé. Les interdits sont minoritaires et toujours explicites ; tout nous est licite sauf ce qui, par sagesse le plus souvent, nous est prohibé. La personne qui ne voit que l’illicite, le « haram », est aveuglé par ses passions ou refuse de voir. L’islam est une religion de bon sens, de libération au sens le plus profond du terme. En effet, une fois que j’ai fait le tri, je suis en mesure de percevoir enfin clairement les multiples opportunités d’épanouissement qui s’offrent à moi. C’est en posant des limites claires et bien définies que l’on permet à un enfant de s’élever, c’est une règle primordiale en éducation. Et l’Homme s’éduque ainsi tout au long de sa vie. Ne (re)connaître aucunes limites, c’est être esclave de ses passions, de ses pulsions, c’est le propre de l’animal. Or nous sommes des êtres doués de raison et, précisément, l’islam invite l’homme à réfléchir, à méditer, à s’instruire : « II y a certes dans la création des cieux et de la terre, et dans l’alternance de la nuit et du jour, des signes évidents pour les doués d’intelligence » (sourate 3, verset 190). En vérité, l’islam n’a pas rendu la foi et la raison antagonistes mais bien complémentaires. La foi invite à raisonner et la raison ne peut qu’admettre tôt ou tard l’existence d’un Dieu Créateur et Tout-Puissant. Ce n’est qu’orgueil de le nier : « Nous leur montrerons Nos signes dans l’univers et en eux- mêmes, jusqu’à ce qu’il leur devienne évident que c’est cela (le Coran), la Vérité. » (sourate 41, verset 53). Non pas qu’ils soient sots ceux qui refusent de croire, mais disons plutôt qu’ils sont aveuglés ou s’aveuglent. Il suffit pourtant de contempler la création, la beauté à couper le souffle des vies animales et végétales, le développement embryonnaire, les fonds marins, l’alternance des saisons, du jour et de la nuit… Il y a en cela des preuves pour les savants…

Et au-delà de la création, du miracle de la vie et de ses merveilles, que dire du Coran lui-même ? Un livre resté inchangé, lu, appris par cœur et récité par des millions de gens depuis sa révélation. Un livre, dans sa forme arabe originelle, d’une éloquence exceptionnelle, d’une forme et d’une beauté éblouissantes et inégalables. Un guide, une lumière, une source de réflexion et de méditation infinies…

Je sais que le Saint-Coran est aujourd’hui source de malentendus, pris à partie et réputé violent. Or, le coran c’est 6236 versets. Et les versets traitant de la guerre, ou étant parfois considérés comme des appels au meurtre, ne sont que 5. Mais quel livre saint, quel traité international, quel ouvrage de philosophie, quel texte fondateur, quelle constitution ne mentionne pas les cas de guerre ? La violence est intrinsèquement ancré dans l’histoire de l’humanité ; aussi, ne nécessite-t-elle pas, elle aussi, d’être réglementée ? La guerre dans le coran, c’est la guerre défensive, en aucun cas une guerre offensive ! Le Coran, des siècles avant les droits de l’homme, appelle à la tolérance et la liberté en matière de culte : « Nulle contrainte en religion ! Car le bon chemin s’est distingué de l’égarement. Donc, quiconque mécroit au Tâghût tandis qu’il croit en Allah saisit l’anse la plus solide, qui ne peut se briser. Et Allah est Audient et Omniscient. » (sourate 2, verset 256) ; « À vous votre religion et à moi la mienne. » (sourate 109, verset 6). Si Dieu l’avait voulu, nous serions tous croyants ; mais nous possédons, au-delà de notre destinée, un libre arbitre et une raison.

L’islam a pour vocation d’apprendre aux hommes à vivre en harmonie avec leur entourage et à n’adorer que Dieu, n’espérer que de Lui, n’attendre de subsistance, de récompense, de protection que de Lui. Tout ce que nous voyons, lisons et entendons n’est en rien imputable à la religion révélée et telle qu’elle fut pratiquée durant les siècles précédents.

Je n’ai pas les compétences linguistiques, les connaissances historiques, culturelles ni même théologiques nécessaires pour défendre au mieux ma religion à travers cette lettre. Simplement, tout simplement, je voudrais que tu comprennes que je n’ai adhéré qu’à un message de culte direct et épuré, de vie simple et saine, de tolérance, de patience, de douceur et de miséricorde et que si tu me vois à en manquer, si tu me vois prisonnière parfois de mes paradoxes, de mes défauts et de mes faiblesses, esclave de la vie d’ici-bas, c’est parce que je suis faible. Mais au fond de mon cœur, au fond de mon âme, ce n’est pas ce à quoi j’aspire, ni ce à quoi m’appelle ma religion, tout au contraire. Je me bats tous les jours contre moi-même et chaque nuit je me couche en regrettant les propos qui ont dépassé mes pensées, les opportunités de bien que je n’ai pas su saisir, le manque de patience ou de douceur dont j’ai pu faire preuve…

Ma vie durant je n’ai espéré que faire ta fierté. J’ai enchaîné des erreurs et des bêtises qui t’ont certainement fait du mal autant qu’elles m’ont fait du tort. Et en découvrant mon Seigneur, j’ai espéré ne pas lire une déception supplémentaire dans tes yeux ; pourtant je savais que même si je prenais le risque de te perdre, j’avais tout à gagner. Aussi, aujourd’hui deux choses me font mal : la première étant de ne pas réussir à adopter un comportement suffisamment exemplaire pour te prouver chaque instant que l’islam est un bienfait et le musulman sincère une miséricorde pour son environnement et la seconde étant que tu fasses partie de ces individus pour lesquels la religion n’est qu’une faiblesse, une philosophie pour simples d’esprit… Dans les deux cas, c’est à moi de redoubler d’efforts : pour devenir chaque jour une personne meilleure, exemplaire dans son comportement et ses réactions, et implorer Dieu chaque jour, chaque soir pour que tu Le connaisses avant de Le rencontrer.

La société ne fait de cadeau à personne, et surtout pas aux femmes voilées. Et quand tout pousse à la folie, à l’individualisme, à l’indifférence face aux souffrances de son voisin proche ou lointain, mon livre saint m’enjoint de répondre au mal par le bien : « La bonne action et la mauvaise ne sont pas pareilles. Repousse (le mal) par ce qui est meilleur; et voilà que celui avec qui tu avais une animosité devient tel un ami chaleureux. » (sourate 41, verset 34)

Tout ce que j’espère aujourd’hui, et tout ce à quoi j’aspire, c’est de m’épanouir dans ma vie profane à travers ma vie religieuse, et l’inverse également, être sincère et ferme dans ma foi et mes actes de bien et te voir me regarder avec tendresse et fierté, comme à l’époque de mes premiers pas.

Le jour où je saurai saisir l’opportunité de te décrire avec plus de passion, plus de précision encore la force de mes convictions, la beauté et le bon sens du message islamique, si Dieu me le permet, j’espère te voir saisir ce qui m’a saisi, être ému et si ce n’est de l’émotion qui m’a étreinte, au moins l’émotion de voir ta fille enfin convaincue d’avoir trouvé sa place, sa vocation et un but, noble, à son existence.